L’huile essentielle de Basilic sacré, une simple élevée au rang de divinité

Pour bien comprendre la dimension sacrée qui auréole ce basilic, il importe de le faire revenir sur ses pas, et de nous rendre sur sa terre originelle, c’est-à-dire l’Inde. Là-bas, le basilic est tout aussi sacré que la verveine l’était pour les Romains, sinon davantage encore. On y élève de tout petits « temples », ainsi que de véritables autels cernés de murs et de piliers, en l’honneur de cette plante à laquelle on s’adresse comme s’il s’agissait d’une divinité.

Qu’est ce que le Basilic sacré ?

Ocimum tenuiflorum, également connu sous les appellations basilic sacré ou tulsi, est une espèce de plante herbacée appartenant à la famille des Lamiaceae. Cette plante, très prisée en Inde pour ses infusions qui remplacent souvent le thé, est renommée pour ses nombreuses vertus en médecine ayurvédique.

En tant que plante herbacée vivace, elle peut atteindre une hauteur d’un mètre et se distingue par ses fleurs de couleur rouge pourpre. On la trouve principalement en Afrique et en Asie du Sud.

Historiquement, en Inde, les fidèles offrent souvent l’Ocimum sanctum aux dieux protecteurs Vishnou et Krishna en guise d’offrande. En Thaïlande, les cultivateurs font pousser cette plante près des temples bouddhistes. On utilise les parties aériennes de l’Ocimum sanctum dans diverses préparations, et on en extrait l’huile essentielle.

La composition de la plante inclut des polyphénols et de l’acide rosmarinique. L’huile essentielle, quant à elle, est riche en eugénol, méthyl-eugénol, béta-caryophyllène, parmi d’autres composés. Cette huile possède des propriétés immuno-stimulantes, antifongiques, antiparasitaires, antimicrobiennes et des effets cannabinoïdes. Elle est également efficace comme répulsif contre le moustique Aedes aegypti.

Concernant sa culture, le basilic sacré nécessite une exposition en plein soleil et préfère un sol bien drainé. Son arrosage doit être régulier en pot, mais peut être limité en pleine terre. La plante atteint une hauteur de 30 à 60 cm et présente un feuillage caduc, vert avec des nervures vert clair.

Le basilic sacré se caractérise par un port ramifié avec des tiges duveteuses de couleur pourpre foncé. Son feuillage dense et caduc est composé de feuilles dentelées et lancéolées, qui dégagent un parfum poivré. La floraison estivale produit des inflorescences terminales de capitules roses à mauves, donnant naissance à des graines noires similaires à celles du basilic méditerranéen.

Un peu d’histoire

Surtout connu pour son huile essentielle, le basilic sacré fait l’objet d’un large emploi phytothérapeutique dans le sous-continent indien depuis des millénaires, où la médecine ayurvédique l’utilise aussi bien cuit que cru.

Voici comment les Hindous conçoivent leur relation spéciale à cette plante, d’après les observations de l’ecclésiastique Vincenzo Maria da Santa Caterina qui se rendit sur place au XVIIe siècle : « Ils ont grand soin de cette herbe ; devant elle, ils murmurent plusieurs fois par jour leur prière, en se prosternant souvent, en chantant, en dansant, en l’arrosant avec de l’eau. Sur les rivages des fleuves où ils vont se baigner, on en voit en grande quantité ; ils croient en effet que les dieux aiment particulièrement cette herbe, et que le dieu Ganavedi (Ganeça) y demeure continuellement. Lorsqu’ils voyagent, à défaut de cette plante, ils la dessinent sur le terrain avec sa racine, voilà comment s’explique qu’au bord de la mer, on remarque si souvent de pareilles figures tracées sur le sable ».

C’est vrai qu’en terme de dieux, le tulasî n’est lié pas moins qu’à Lakshmî et à Vishnou, et cette herbe ceint le front de bien d’autres divinités du panthéon hindou, sachant que son parfum raffiné reste associé à la puissance divine. Plante féconde et fécondante, le tulasî est invoqué pour la protection de toutes les parties du corps humain, de la tête jusqu’aux pieds, et à chacune d’elles correspond une prière bien distincte. L’incomparable tulasî intervient aussi bien pour la vie que pour la mort. C’est une plante immortelle « qui contient en elle toutes les perfections, qui éloigne les maux, qui purifie et qui guide au paradis céleste ceux qui la cultivent ».

Quelles sont les propriétés pharmacologiques de l’huile essentielle de parties aériennes de basilic sacré ?

Le Basilic sacré, cultivé en Inde depuis des millénaires, est reconnu pour son importance dans les pratiques religieuses et médicinales. Connu sous le nom de Tulsi en médecine ayurvédique, il est apprécié pour combattre les infections respiratoires, les toxines et les troubles du sommeil. Ocimum sanctum, tonifiant et revitalisant, protège le système cardio-vasculaire et digestif.

Ses propriétés sont vastes, incluant des effets antalgique, anti-inflammatoire, antibactérien, antiviral, antifongique et antioxydant. En tant que plante adaptogène, le basilic sacré agit comme un antidépresseur naturel, armant le corps contre le stress.

En usage externe, le Tulsi purifie la peau en éliminant les toxines et en atténuant les démangeaisons. Sur les cheveux, il est efficace contre les pellicules et l’excès de sébum. Les feuilles fraîches sont idéales pour des infusions. En Thaïlande, les feuilles de basilic sacré, appelées kaphrao, sont couramment utilisées en gastronomie. Contrairement au basilic commun, le Holy basil est généralement consommé cuit.

Propriété antimicrobienne et antiparasitaire

Immunostimulante, l’huile essentielle de basilic sacré est aussi antifongique, vis-à-vis de Cladosporium herbarum et Penicillium glabrum, vis-à-vis de Candida, Aspergillus & dermatophytes (y compris résistants au fluconazole) par lésion de la membrane cellulaire et entraine une réduction considérable de la quantité d’ergostérol, un composant spécifique de la membrane cellulaire fungique.

Le basilic sacré présente des propriétés antibactériennes remarquables, notamment grâce à l’eugénol, efficace contre divers agents pathogènes tels que Trichomonas vaginalis, Helicobacter pylori, Listeria monocytogenes, Escherichia coli et mycoplasmes. Cette substance renforce l’effet des antibiotiques, créant une synergie dans la lutte contre les infections.

Cette plante est également reconnue pour son action antivirale, particulièrement contre l’herpès virus, et se révèle être un répulsif efficace contre Aedes aegypti. Elle contient des propriétés anthelminthiques grâce à l’eugénol. Sur le plan immunitaire, différents constituants d’Ocimum tenuiflorum offrent des effets immunomodulateurs, stimulant les réponses humorales et cellulaires, influençant notamment la signalisation GABAergique, cruciale dans la réponse immunitaire.

Des études ont montré que les extraits d’Ocimum sanctum, notamment éthanoliques, augmentent significativement les niveaux d’interférons et d’interleukines chez l’homme, renforçant ainsi l’immunité. De plus, l’acide ursolique et l’acide oléanolique présents dans les feuilles peuvent être les principaux acteurs de cette activité immunomodulatrice.

Au niveau anti-infectieux, l’extrait éthanolique d’Ocimum sanctum s’avère efficace contre Streptococcus mutans et d’autres souches bactériennes résistantes aux antibiotiques, devenant ainsi un élément potentiel dans le traitement des maladies infectieuses. Ocimum tenuiflorum montre également des propriétés virucides contre l’herpèsvirus bovin de type 1 et une activité antifongique contre des champignons tels que Aspergillus.

Enfin, l’activité anti-paludique d’Ocimum tenuiflorum est particulièrement notable, son huile essentielle et l’eugénol qu’elle contient ayant un fort pouvoir insecticide et larvicide, essentiels dans la lutte contre le paludisme.

Propriété analgésique et anti-inflammatoire

L’huile essentielle de basilic sacré, agissant via les récepteurs alpha2-adrénergiques et opioïdes, est efficace comme analgésique, notamment dans le traitement de la douleur neuropathique et de diverses maladies neurodégénératives et métaboliques. Elle agit comme un ligand pour les récepteurs cannabinoïdes de type 2 (CB2), sans les effets psychotropes associés aux cannabinoïdes de type 1 (CB1). Ses propriétés anti-inflammatoires aident à prévenir la néphrotoxicité induite par le cisplatine et à diminuer la cardiotoxicité de la doxorubicine, ce qui lui confère un potentiel thérapeutique significatif pour une multitude de maladies liées à l’inflammation et au stress oxydatif.

En tant qu’anti-inflammatoire, l’huile essentielle inhibe la Cox-2 et la synthèse de prostaglandines, en particulier dans la muqueuse du colon. Elle possède aussi des propriétés antiarthritiques et on la considère comme un agent préventif du cancer. Les composés tels que le β-caryophyllène et l’eugénol jouent un rôle clé dans la prévention et le traitement de certains types de cancers.

Les effets immunomodulateurs et anti-inflammatoires de l’huile essentielle d’Ocimum sanctum sont principalement dus à l’eugénol, qui inhibe la voie du NF-κB. Des études ont démontré son efficacité contre l’inflammation aiguë et chronique, ainsi que des actions antalgiques et antipyrétiques. Ces effets sont notamment observés grâce à l’inhibition des voies de la cyclooxygénase (COX) et de la lipoxygénase (LOX).

Dans le contexte de la douleur neuropathique, l’extrait d’Ocimum sanctum a révélé une capacité à atténuer les symptômes, notamment grâce à sa richesse en saponines triterpénoïdes telles que l’acide ursolique et l’acide oléanolique. Ces composés contribuent à la diminution du stress oxydatif et des niveaux de calcium, impliqués dans la pathogenèse de la douleur neuropathique.

Propriété sur le système nerveux central

Parasympatholytique et sympatholytique, l’huile essentielle de basilic sacré est hypotensive par effet vasodilatateur périphérique. Elle prévient la réduction de dopamine dans le striatum, et prévient de la lipoperoxydation, ce qui engendre un effet potentiel dans la maladie de Parkinson, ainsi que neuroprotecteur dans la sclérose en plaques.


L’huile essentielle de basilic sacré
est un anxiolytique efficace, agissant comme un antagoniste puissant des récepteurs nicotiniques de l’acétylcholine (α7-nAChRs), sans influencer les récepteurs aux benzodiazépines, sérotoninergiques ou GABAergiques.

L’herbaliste C.Bernard a rapporté en 2011 l’effet du tulsi sur le système neuropsychologique. Après avoir consommé de l’infusion de tulsi, il a ressenti une augmentation de sa « force tranquille ». Singh et al. en 2015 ont confirmé que le tulsi est une herbe calmante. Elle atténue les effets du stress chronique, comme la nervosité, l’insomnie et les troubles digestifs.

Des recherches sur des modèles animaux ont été menées. Elles montrent que les extraits de feuilles de tulsi stabilisent les niveaux de corticostérone. Cette stabilisation se produit lors d’un stress sonore aigu et chronique. Les composants ocimumoside A et B de O.tenuiflorum agissent contre le stress. Ils normalisent la glycémie, les taux de corticostérone, de créatine kinase et réduisent l’hypertrophie surrénale.

La dépression et l’anxiété sont fréquentes dans l’Union européenne. Ces troubles représentent une part importante des années vécues avec une invalidité. Dans ce contexte, les effets anxiolytiques et antidépressifs d’Ocimum sanctum sont particulièrement importants.

En plus de ces propriétés, Ocimum tenuiflorum présente également des activités nootropiques et neuroprotectrices. Des études récentes soulignent le rôle du tulsi. Kusindarta et al. en 2018 ont découvert son influence sur la choline acétyltransférase (ChAT) dans l’hippocampe. Ceci améliore les capacités cognitives. En 2021, les recherches de Mataram et al. ont montré que l’extrait de tulsi augmente la densité neuronale. Cela se produit dans les zones hippocampiques des rats atteints de la maladie d’Alzheimer. Ces résultats suggèrent que le tulsi pourrait être un neuroprotecteur efficace contre cette maladie.

Autres propriétés

Le basilic sacré, connu pour ses propriétés spasmolytiques et anti-convulsivantes, est aussi un puissant antioxydant protégeant l’ADN. Il présente un effet antiagrégant et anti-ostrogénique, et pourrait contribuer à réduire la consommation d’alcool. Son effet inotrope négatif s’explique par son rôle de calcium-bloqueur.

En tant que cardioprotecteur, le tulsi s’est avéré efficace. Il protège significativement contre l’infarctus du myocarde chez le rat. Cette protection s’accompagne d’une augmentation des enzymes antioxydantes dans le myocarde. Ses huiles essentielle et fixe luttent contre l’hypercholestérolémie. Elles réduisent les lipides et combattent le stress oxydatif. De plus, un médicament contenant du tulsi améliore la pression artérielle. Il améliore également le profil lipidique chez des patients coronariens.

Le tulsi agit aussi comme un hépatoprotecteur. On a prouvé qu’il pouvait réduire les taux sériques d’alanine aminotransférase (ALAT), un indicateur de dysfonctionnement hépatique. L’extrait aqueux de tulsi inhibe l’activité de l’aldose réductase, enzyme clé dans la voie des polyols.

Le tulsi protège le foie contre les dommages causés par différents agents. Ces agents incluent l’atorvastatine, le peroxyde d’hydrogène et le tétrachlorure de carbone.

Ses propriétés anticancéreuses se manifestent dans des études précliniques. Le tulsi prévient l’apparition de cancers liés à des substances chimiques. Son action antioxydante, la modification de l’expression génique, l’induction de l’apoptose et l’inhibition de l’angiogenèse contribuent à cet effet.

En matière de contraception, le tulsi agit chez les rongeurs grâce à l’acide ursolique. Cet acide a un effet anti-œstrogénique. Les feuilles de tulsi montrent également une activité antiandrogénique. Cette activité influence le comportement sexuel masculin et la motilité des spermatozoïdes. La fertilité des animaux affectée par le tulsi est réversible après l’arrêt du traitement.

Cependant, avant de considérer le tulsi comme un moyen contraceptif viable pour les humains, des essais cliniques supplémentaires sont nécessaires pour évaluer son efficacité et sa sécurité.

L’huile essentielle de Basilic sacré requiert-elle des précautions d’emploi ?

  • Contre-indiquée chez la femme enceinte ou allaitante
  • Contre-indiquée chez l’enfant de moins de 12 ans
  • Pas plus de 10 jours d’utilisation (risque de mutagénicité et de carcinogénicité au long cours et/ou à fortes doses)
  • Interactions médicamenteuses avec les huiles essentielles contenant des cétones à plus de 10 %
  • Contenant des phénols et des sesquiterpènes, risque d’auto toxicité par interactions moléculaires
  • Dermocaustique à l’état pur, dilution requise
  • Prudence en cas de gastrite et d’ulcère per os
  • Ne pas diffuser, ni mettre dans l’eau du bain
  • Pas d’inhalation humide
  • La métabolisation hépatique peut provoquer une hépato toxicité au long cours ou à fortes doses. Il convient de toujours la diluer et de l’ associer avec d’autres huiles essentielles bien tolérées. Cela permet de « couper » et de diminuer sa proportion dans le mélange final par voie orale.

Sources bibliographiques médicales et essais cliniques

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